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Page:Harvey - Les demi-civilisés, 1934.djvu/79

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les demi-civilisés

Était-ce une expiation ou l’une des inépuisables merveilles de la véritable amitié ?

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L’image de Dorothée m’obsédait depuis la veille. Ce jour-là, tout en pensant à elle, je lisais l’Othello de Shakespeare. De temps à autre, mes regards se portaient sur les livres de ma bibliothèque. Je finissais par m’évader de ma lecture, songeur et presque somnolent. Je voyais, à travers la fumée de ma cigarette, Shakespeare, gigantesque, sensible, violent, tendre et brutal, qui lançait dans le monde, en nuages labourés d’éclairs et luisants d’or, tous les rêves, tous les drames, toutes les cruautés mêlées à d’infinies délicatesses. Puis la face de Goethe, très pâle, entourée d’Hermann et Dorothée, de Marguerite, de Faust rajeuni, et, derrière le groupe, le rire crispant et magnétique de Méphisto… Molière, un pli amer au coin de la lèvre, tenait un Tartuffe d’une main puissante, tandis que, de l’autre, il arrachait des entrailles de cet être fourbe et faux la nauséabonde enveloppe de son hypocrisie. Balzac montrait un crâne é-