Page:Harvey - Marcel Faure, roman, 1922.djvu/121

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vant, il m’avait donné rendez-vous au Château, à Québec, et m’avait révélé le complot. J’en fus atterré. De deux choses l’une : où trouver des capitaux immédiatement, ou m’écrouler tout entier.

« Pas une minute à perdre. J’avais des obstacles infranchissables. Mon entreprisse n’offrait pas de revenus suffisants pour payer intégralement la dette ; d’un autre côté, comment approcher une institution de finance canadienne-française ? Comment vaincre la pusillanimité, le manque de hardiesse de mes compatriotes ?

« Trois jours durant, je fis la navette entre Montréal et Québec. Partout s’offrait un front invincible. De guerre lasse, j’enfonçai les portes par la persuasion. Je réunis les directeurs de L’Épargne Canadienne et je leur parlai pendant trois heures, les yeux dans les yeux, toute mon âme lancée vers leurs âmes rétives et piétées. Toutes mes facultés tendues comme des arcs faisaient partir les arguments comme des flèches. Je ne leur laissais pas prendre haleine ; je voyais poindre les objections sur leurs lèvres : j’y ripostais sans les entendre. Petit à petit, leur obstination fléchissait.

« Après l’entretien, la partie était gagnée ; j’avais été très éloquent, et tous mes muscles