Page:Harvey - Marcel Faure, roman, 1922.djvu/30

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

tranger. Un jour, il dit à M. Fabien Faure, son père : « Savez-vous pourquoi les Anglais nous traitent de race inférieure ? »

— Pourquoi ?… Parce qu’ils ne nous regardent qu’à travers leurs préjugés.

— Il y a une autre raison : chaque jour, des milliers d’entre eux lisent des articles dirigés contre nous ; ces articles, ce sont les étiquettes des marchandises qu’ils achètent et dont aucune ne porte la marque de notre nationalité. Ils nous jugent par nos fruits. Or, à part les fruits du sol, qu’avons-nous fait pousser dans la plus vieille province du Dominion ?

Marcel approchait alors de sa quatorzième année. Il avait fréquenté l’Académie Commerciale de Québec, où il s’était signalé par la sûreté de son jugement, la fidélité de sa mémoire, surtout son talent inné des affaires. Pour mieux cultiver cette intelligence précoce, M. Faure envoya son fils aux études classiques. À vingt et un ans, Marcel était bachelier ès arts. À la fin de ses cours philosophiques, il écrivit à son père cette lettre significative :

« Mon cher père,

« Nous venons de finir notre retraite de vocation. J’ai les genoux fatigués et l’âme exténuée de recueillement. Non pas que je