Page:Harvey - Marcel Faure, roman, 1922.djvu/67

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rige vers le porche. Félix Brunelle vient rendre visite à son ami de jeunesse qu’il n’a guère revu depuis dix ans. Qui n’a éprouvé, à certaines heures, un arrière-goût plus précis des choses oubliées, qui inspire le désir fougueux de renouer notre vie au passé et de recreuser, dans notre organisme, la trace des images effacées au frottement des événements ? On dirait une liqueur déjà bue il y a longtemps, et qui revient mousser dans la bouche avec des piquements dont on aime à prolonger la sensation. En cette matinée de juillet lavée par une rosée que le soleil avait avalée à petits coups, des bouffées de souvenirs avaient parcouru les sens de Félix ; il en avait humé l’arôme longuement. Une figure exceptionnellement sympathique, celle de Marcel, s’était détachée de la foule qui encombrait sa mémoire, et, rendu tout entier à son affection ressuscitée, il avait filé vers Valmont. En se revoyant, les deux hommes eurent un élan l’un vers l’autre : « Mon vieil ami, ce qu’il fait bon se retrouver ! », dit Félix.

— Toujours le même, le Félix de l’inédit et de l’imprévu. Il n’y a que toi, pour tomber ainsi sur nous sans crier gare, après huit ans d’oubli. N’importe, je suis content de te la serrer, grand idiot !