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Page:Hasek-Le brave soldat chveik,1948.djvu/106

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Moi, je vous ai assez vus. Vous vous portez tous à merveille, ou bien vous n’auriez jamais pu abîmer votre estomac comme vous venez de le faire. J’ai dit. En route !

Au lavage, quand ce fut le tour de Chvéïk, le docteur Grunstein, s’étant souvenu brusquement de la singulière visiteuse, demanda au protégé de cette dernière :

— Vous connaissez Mme la baronne von Botzenheim ?

— Je suis son beau-fils qu’elle avait abandonné quand j’étais tout petit et qu’elle vient de retrouver, dit Chvéïk avec son sang-froid coutumier.

Le docteur Grunstein dit simplement :

— Ensuite, Chvéïk passera au clystère !

Ce soir-là, la tristesse régna dans le dortoir. Tout à l’heure, leurs estomacs étaient remplis de bonnes choses et de friandises et, maintenant, ils ne contenaient qu’une tasse de thé et un morceau de pain.

Le 21 soupira de son lit près de la fenêtre :

— Vous me croirez si vous voulez, camarades, mais j’aime mieux le poulet à la sauce que le poulet rôti.

— En couverte ! cria quelqu’un ; mais ils étaient tous si affaiblis à la suite du festin contrarié que personne ne bougea.

Le docteur Grunstein tint parole. Le lendemain matin on vit arriver plusieurs médecins militaires constituant la redoutable commission.

Ils passaient gravement entre les lits, et on n’entendait plus qu’une seule et unique phrase :

— Montrez-nous votre langue !

Chvéïk tira une langue si longue que son visage se