Page:Hasek-Le brave soldat chveik,1948.djvu/25

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qui pourrait lui faire du tort, vu sa qualité d’honnête commerçant.

Son ami lui expliqua que tous, à part un seul, avaient été arrêtés par suite de l’assassinat de l’archiduc.

M. Palivec se fâcha et déclara que lui était mis « au chose » non pas à cause d’un idiot d’archiduc, mais bien à cause de Sa Majesté l’Empereur. Et, comme les « conspirateurs » s’intéressèrent à son cas, il leur raconta comment les mouches avaient sali son tableau de François-Joseph 1er.

— Elles me l’ont bien arrangé, les garces, ainsi achevait-il son histoire du tableau, et à cause d’elles me voilà à la tôle par-dessus le marché. Quelle chierie ! Je ne leur pardonnerai jamais ça, à ces saletés de mouches !

Chvéïk s’était recouché, mais il ne dormit pas longtemps. On vint le chercher pour le conduire à l’interrogatoire.

Et c’est ainsi qu’en montant l’escalier conduisant à la IIIe Section Chvéïk gravissait son Calvaire sans s’apercevoir lui-même qu’il était un martyr désigné.

Ayant remarqué un écriteau : « Défense de cracher par terre dans les couloirs », il pria le gardien qui le conduisait de lui permettre de cracher dans un crachoir, et, rayonnant de candeur, il entra au bureau.

— Je vous souhaite bonsoir à tous, Messieurs ! dit-il.

En réponse à sa politesse, quelqu’un lui donna un coup entre les côtes et le mit devant une table derrière laquelle était assis un monsieur à face glaciale de bureaucrate et aux traits empreints de