Page:Hasek-Le brave soldat chveik,1948.djvu/52

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sa ceinture de cuir la considéra quelques minutes, la jeta dans un coin et éclata en pleurs qu’il s’essuyait de ses mains sales en gémissant :

— Je suis père de famille et on m’a arrêté pour ivrognerie et débauche. Jésus-Maria, qu’est-ce qu’elle va dire, ma pauvre femme, et qu’est-ce qu’on va penser à mon bureau !

Et il répétait tout le temps la même phrase sans y rien changer. Enfin, il se tranquillisa un peu, marcha vers la porte, contre laquelle il frappa des pieds et des poings.

On entendit des pas, puis une voix :

— Qu’est-ce que vous voulez ?

— Je veux sortir ! dit le malheureux noceur d’une voix blanche comme s’il ne lui restait plus que très peu de jours à vivre.

— Pour aller où ? questionna la voix derrière la porte.

— À mon bureau, répondit le malheureux père, rond-de-cuir, ivrogne et débauché.

Un rire déchaîné, un rire atroce retentit dans le couloir et les pas s’éloignèrent rapidement.

— On dirait que ce monsieur ne doit pas vous aimer beaucoup pour rire tant que ça, dit Chvéïk, tandis que le désespéré se rasseyait à côté de lui. Quand un homme de la police en veut à quelqu’un, il est capable de tout, vous savez. Maintenant, si vous n’avez pas l’intention de vous pendre, restez tranquillement assis et attendez comment les choses vont tourner. Si vous êtes employé dans un bureau, marié et père de famille, votre situation