Page:Hasek-Le brave soldat chveik,1948.djvu/88

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enveloppé dans un drap imbibé d’eau glaciale.

— C’est le troisième cette semaine, observa le voisin de droite ; et toi, qu’est-ce que tu as ?

— J’ai des rhumatismes, répondit Chvéïk suscitant une hilarité générale. Le moribond tuberculeux en riait lui-même aux éclats.

— Tu tombes bien avec tes rhumatismes, prononça à l’adresse de Chvéïk un homme gros et gras : c’est comme si tu disais que tu as des cors aux pieds. Je suis anémique, j’ai la moitié de l’estomac foutu, cinq côtes en moins, et pourtant on ne veut rien me croire. Par exemple, nous avons eu ici un sourd-muet. Pendant quinze jours, on l’a enveloppé toutes les demi-heures dans des draps trempés dans l’eau froide ; chaque jour on lui passait un clystère et on lui nettoyait l’estomac. Tout le monde croyait qu’il avait gagné la partie et qu’on allait le lâcher, mais un beau jour le docteur lui a prescrit quelque chose pour vomir. Et ça lui a été fatal. Il a perdu courage et, à la fin des fins, il a déclaré qu’il n’avait plus de force de faire le sourd-muet et qu’il avait retrouvé l’ouïe et la parole. Nous autres, on disait tout pour l’encourager et pour l’empêcher de faire une bêtise. Mais il n’a rien voulu entendre et le matin, à la visite, il a déclaré qu’il entendait maintenant très bien et parlait mieux encore. Il a été fait, bien sûr.

— Celui-là, au moins, a tenu bon pendant assez longtemps, dit un autre simulateur qui prétendait avoir une jambe plus courte que l’autre d’un décimètre ; c’est pas comme cet imbécile qui faisait semblant d’avoir eu une attaque d’apoplexie. Trois quinines, un lavement et une journée sans rien