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Page:Hatin - Histoire du journal en France.djvu/144

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chez le duc de Bassano, qui répond à ses représentations : « L’empereur le veut. » L’article est envoyé à l’imprimerie ; mais, à la lecture de l’épreuve, Étienne hésite plus que jamais, et il se décide à suspendre la publication. Le lendemain l’empereur demande son journal, et cherche inutilement l’article. L’orage tombe sur le duc de Bassano ; celui-ci s’excuse sur le manque de place, puis il fait appeler Étienne en toute hâte, lui fait part du mécontentement de l’empereur, et le rend responsable des suites si l’article ne paraît pas le lendemain. Plus d’un autre aurait cédé ; mais, courageux jusqu’à la fin, et jugeant le factum indigne de la main qui l’a tracé, Étienne brave le courroux impérial : l’article est définitivement retiré. Le jour suivant, le duc de Bassano, qui a lu le Journal de l’Empire, aborde en tremblant Napoléon, qui s’écrie : « Et mon article ? — Sire, il n’a pas paru. — Qui donc s’avise de mépriser mes ordres ? — C’est M. Étienne : il prétend que l’article n’est pas digne de vous, et il refuse de le publier. — Ah ! M. Étienne a osé… Puis, après un moment de réflexion : Eh bien ! il a eu raison. »

Le 1er avril 1814 le Journal de l’Empire reprit son ancien titre, qu’il quitta de nouveau le 21 mars 1815 pour le reprendre à la seconde rentrée de Louis XVIII. On sait avec quelle furie il se retourna alors contre l’ogre de Corse, contre les hommes et les choses de l’empire. Ce sont là de tristes pages que nous voudrions pouvoir effacer, pour l’honneur du journalisme, quelque naturel, quelque vif que dût être le ressentiment des frères Bertin contre l’homme qui les avait dépossédés. Quoi qu’il en soit, l’intervention du Journal des Débats pour le nouveau gouvernement, qui les avait réintégrés dans