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coutume ; et elle parlera toujours, jusqu’à ce que les forces lui manquent ; et elle se parera comme une coquette, et elle mourra comme une sainte.

Et elle écrira cependant à son bel ami qu’elle finit comme elle a commencé, c’est-à-dire qu’elle l’aime avec autant de passion que jamais.

Et le mari enverra cette lettre à l’amant.

Et l’on ne saura jamais ce que l’amant est devenu.

Et l’on ne se souciera guère de le savoir.

Et tout le livre sera moral, utile et honnête, puisqu’il prouvera que les filles sont en droit de disposer de leur cœur, de leur main et de leurs faveurs, sans consulter leurs parents, sans aucun égard à l’inégalité des conditions.

Et que, pourvu qu’elles parlent toujours de vertu, il est inutile de la pratiquer.

Et qu’une jeune fille peut d’abord coucher avec un homme et qu’elle doit ensuite en épouser un autre.

Et qu’en se livrant au vice, il suffit d’avoir de temps en temps des remords pour être vertueux.

Et qu’un mari doit recevoir l’amant de sa femme dans sa maison.

Et que la femme doit l’embrasser sans cesse, et se prêter de bonne grâce aux plaisanteries du mari et aux égarements de l’amant.

Et elle dira que l’amour est inutile et déplacé entre deux époux, et elle le prouvera ou croira le prouver.

Et le livre sera écrit d’un style emphatique, pour en imposer aux personnes simples.

Et l’auteur entassera les phrases, et croira entasser les raisonnements.

Et il entassera les exagérations, et il ne fera jamais d’exceptions.

Et il voudra paraître nerveux, et il ne sera qu’outré, et il aura grand soin de conclure toujours du particulier au général.

Et il ne connaîtra jamais ni la simplicité, ni la justesse, ni le