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Page:Hatin - Histoire politique et littéraire de la presse en France, tome 2.djvu/126

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plus on trouve à s’accommoder dans la foule. Le seul inconvénient qu’il y aurait dans leur trop grande multiplication ne regarde absolument que ceux qui, n’envisageant que le produit, en seraient volontiers les monopoleurs, puisque personne n’est contraint à les prendre. Qu’ils se nuisent réciproquement, qu’un journal s’élève à Paris sur les ruines d’un autre journal, qu’importe au public ? Que lui fait l’intérêt de quelques particuliers ?

Si l’art de se faire valoir par l’esprit des autres est déjà très-ancien, puisqu’il existait longtemps avant Pline, il faut convenir que les journalistes, les faiseurs de feuilles, etc., ont si bien affermi leur possession, qu’on ne s’avise plus de la contester, et qu’ils moissonnent partout. Nous n’examinerons point quels sont les grands fruits que les lettres tirent des journaux, ni si, depuis leur invention, il s’est formé par leur secours ou se forme encore de plus habiles gens. Il paraît que les connaissances sont au moins par là plus répandues. Si l’on objecte que plus les journaux semblent en faciliter l’accès, plus aussi le goût du travail a sensiblement diminué, comme on s’en aperçoit de reste au ton superficiel ou frivole de la littérature moderne, eh ! n’est-il pas bien commode et bien agréable de savoir tout, sans rien apprendre ; de pouvoir, avec peu de fond et beaucoup de montre ou de surface, figurer parmi les gens instruits ? Voilà le mérite particulier de notre âge ; on ne peut trop l’en féliciter. Tant que nous aurons des journaux et des dictionnaires portatifs, il n’y aura, dans aucun ordre, d’ignorance absolue ; tout le monde aura l’air d’être instruit, les gens de lettres fourmilleront, etc., etc.




Sur la Critique et sur les Critiques

Méchant métier que la critique et tout exercice d’esprit, où, renonçant à flatter les hommes, on cherche seulement à les éclairer sur la faiblesse ou sur les défauts de leurs productions, et à répandre quelques lumières sur les objets dont ils s’occupent ! Le plus grand malheur de la critique, c’est qu’elle est rarement