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Page:Hatin - Histoire politique et littéraire de la presse en France, tome 2.djvu/444

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bles de Racine ; il en indiquait les défauts, il en montrait les beautés toutefois, et remarquait que Voltaire, qui s’était essayé sur un sujet à peu près semblable dans Zulime, était loin d’avoir réussi à égaler Racine. « C’est donc une terrible entreprise, concluait-il, que de refaire une pièce de Racine, même quand Racine n’a pas très-bien fait. »

Que La Harpe, lié comme il était à Voltaire par les liens d’une reconnaissance presque filiale, eût pu choisir un autre moment et une autre circonstance pour parler de Voltaire que cette trève de silence qui s’observait depuis sa mort, on le conçoit aisément ; mais quand on a lu le judicieux et innocent article dans le Mercure même (5 juillet 1778), on a peine à comprendre la colère et l’indignation factices qu’il excita au sein de la coterie voltairienne. Une lettre adressée au Journal de Paris le dénonçait à la vindicte des frères et amis. La Harpe s’empressa de se justifier : il avait parlé de Voltaire, dit-il, comme il eût parlé d’un classique, d’un ancien ; il a parlé de Zulime comme il eût fait de l’Othon de Corneille, sans prétendre rabaisser le génie du poète lui-même. Il avait mille fois raison, sauf un léger coin de convenance et d’à-propos, sur lequel il faisait tout le premier son meâ culpâ d’assez bonne grâce : il était évident que dans ce cas, comme dans bien d’autres, l’instinct du critique, de l’homme qui se sent une idée juste et qui ne résiste pas à la