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se dépensait à Londres, et c’était tout bénéfice pour Londres. Ce calcul n’est peut-être pas tout à fait celui des Romains ; mais les Romains n’étaient pas marchands.

Cet entrepreneur de la Gazette anglo-française se nommait Swinton ; l’auteur du plan était un réfugié français nommé de Serre de Latour. Le premier mettait dans l’association son argent, son industrie ; l’autre y mettait son esprit. Voici comment, selon Brissot, s’était formée cette association.

Né sans fortune, mais d’une bonne famille, élevé dans un monde brillant, mais incapable d’en soutenir la dépense, de Latour avait fait la cour, quoique marié, quoique père de plusieurs enfants, à la femme de l’intendant d’Auvergne ; elle était sa parente, il était le secrétaire du mari ; elle était jeune, jolie, aimable ; le mari était vieux, laid, grondeur. Le secrétaire fut donc bientôt préféré à l’intendant. Cette liaison ne pouvait manquer d’attirer des malheurs au couple d’amants. Ils arrêtèrent de prendre la fuite, mais en se munissant de secours abondants, pour ne pas tomber dans la misère. L’Angleterre seule offrait un asile impénétrable à toutes les recherches du ministère français. Ils le choisirent. Les premiers mois s’écoulèrent délicieusement ; la misère arriva. L’imprévoyant de Latour n’avait pas songé à la prévenir. Il fallait pourtant s’en tirer. On épuisa toutes les ressources. L’amante infortunée