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Wasp grand barbouilleur de petites feuilles, et M. Darnaud de Baculard, qui les sous-travaille, les colporte et s’y loue, et l’inconnu M. d’Açarq, qui y fait mettre les adresses de son bureau d’éloquence. »

On procède ici comme là : on commence par « dévoiler aux yeux les moins clairvoyants le mérite littéraire de M. Fréron, ses petites finesses, ses petites inepties, ses petites asineries, ses petites filouteries littéraires », on fait enfin tout le possible pour le démonétiser, pour « le réduire à la mendicité, en attendant qu’il aille aux galères » et quand on l’a bien abîmé, et qu’on a ainsi bien préparé son auditoire, on prend corps à corps la critique de l’ode à Voltaire, et l’on prouve, avec une superbe prodigieuse, que Fréron n’est qu’un âne, et Le Brun un Pindare.

Enfin le poète irascible porta dans cette lutte un ressentiment tellement outré qu’il s’attira de Voltaire lui-même, si bon juge dès qu’il s’agissait d’un autre, cette leçon de tact et de goût : « Il y a des choses bien bonnes et bien vraies dans les brochures que j’ai reçues. J’aurais peut-être voulu qu’on y marquât moins l’intérêt personnel. Le grand art dans cette guerre est de ne paraître jamais défendre son terrain et de ravager seulement celui de son ennemi, de l’accabler gaiement. »

Le Brun sentait bien lui-même ce que cette lutte avait de peu digne et de compromettant.