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ques, d’À quoi rêvent les jeunes filles et l’on dit de M. Edmond Rostand qu’il était un second Musset. Grand Dieu ! qu’y a-t-il de commun aux deux poètes ? La sensibilité ? Celle de M. Rostand est cérébrale, celle du poète des Nuits est au cœur. L’imagination ? Celle de l’auteur de l’Aiglon est riche et se suffit à elle-même ; celle de Musset est, relativement, pauvre, et à la remorque de la sensibilité ; Alfred de Musset n’est inspiré que quand il est profondément ému. La fringance, cavalière et Louis XIII, de M. Rostand, n’est pas celle de Musset, libertine, impertinente, xviiie siècle. Mais nous songions, me dira-t-on, au Musset débutant, à celui des Contes d’Espagne et d’Italie. Or, en 1830, le jeune homme écrit à son oncle Desherbiers, en lui envoyant des vers : « Tu verras des rimes faibles ; j’ai eu un but en les faisant, et sais à quoi m’en tenir sur leur compte ; mais il était important de se distinguer de cette école rimeuse, qui a voulu reconstruire et ne s’est adressée qu’à la forme, croyant rebâtir en replâtrant ». Plus tard, en 1838, il écrira, dans le même sentiment, à sa « marraine », à propos d’une pièce projetée sur Pauline Garcia : « Il faut que ce soit senti à fond. Vous savez d’ailleurs que j’ai et aurai toujours la bêtise d’être consciencieux là-dessus… J’aime mieux faire une page simple, mais honnête, quu’un poème en fausse monnaie dorée ». Rapprocher le Rostand des Romanesques de l’auteur d’On ne badine pas avec l’amour est un leurre énorme. Considérez un instant l’âme de Camille