Page:Hawthorne, La maison aux sept pignons, Hachette, 1886.djvu/246

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doux, plus flatteur, l’aspect de la vieille maison, bien que l’ombre tombât plus profonde aux angles de ses nombreux pignons, sous la projection de l’étage en saillie, et sous le grand portail entre-bâillé. Chaque minute écoutée ajoutait au charme pittoresque du jardin ; les arbres fruitiers, les taillis, les buissons en fleurs s’enveloppaient d’obscurité. Les détails vulgaires s’effaçaient. Chaque fois que la brise de mer se frayait un passage dans les ramures agitées, on entendait murmurer parmi les feuilles une centaine d’années mystérieuses. Le parquet noir, la table et le banc circulaire de la tonnelle recevaient, par les interstices de la végétation qui en recouvrait le toit et en masquait les fenêtres, des lueurs argentées que les caprices du vent et des nuages éparpillaient, çà et là, dans un désordre mobile.

Après cette journée fiévreuse, la fraîcheur de l’atmosphère était si douce qu’elle pénétrait le cœur et, le rajeunissant, le mettait par là même en rapport sympathique avec l’éternelle jeunesse de la Nature. Notre artiste subit cette influence revivifiante. Elle lui fit sentir, — ce qu’il oubliait parfois, tant il avait été jeté de bonne heure au plus fort des luttes de la vie, — combien il comptait encore peu d’années.

« Il me semble, remarqua-t-il, que jamais je n’ai vu descendre une aussi belle soirée, jamais ressenti comme en ce moment une impression qui ressemble tant au bonheur. Et après tout, que de bonnes choses dans ce monde où nous vivons ! Qu’il est bon, qu’il est beau et qu’il est jeune aussi, sans corruptions réelles, sans décrépitude manifeste !… Cette vieille habitation, par exemple, qui, avec son odeur de bois vermoulu, m’em-