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LA GRANDE ESCARBOUCLE

Revenons à nos deux époux : Mathieu et sa femme passèrent ensemble de longues et paisibles années, aimant à raconter à qui voulait l’entendre l’histoire de la grande escarboucle. Mais, sur la fin de leur vie, on n’avait plus grande foi dans cette histoire, car il paraît qu’à peine eurent-ils pris la sage résolution de renoncer à cette pierre merveilleuse autour de laquelle toute chose perdait son éclat, sa splendeur s’évanouit pour toujours. Aussi, lorsque d’autres pèlerins, poussés par la curiosité, parvinrent à l’endroit où les deux époux l’avaient trouvée, ils ne virent plus qu’une pierre opaque dont la surface était recouverte de petites paillettes semblables à du mica.

Suivant une autre tradition, lorsque le jeune couple fut parti, la pierre se détacha d’elle-même du sommet de la colline et tomba dans le lac, au fond duquel on peut encore l’apercevoir à l’heure de midi.

D’autres enfin croient que cet inestimable diamant brille comme par le passé, et que dans les jours d’été on en peut encore contempler l’éclat. J’avoue pour ma part que dans une excursion à travers les montagnes Blanches j’ai vu leurs sommets illuminés d’une merveilleuse lumière, et que légèrement enclin à la poésie, j’ai cru devoir l’attribuer à la grande escarboucle.