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CONTES ÉTRANGES

comme par enchantement un splendide édifice sur l’ancien emplacement depuis longtemps dévasté de la ferme de son père. Ce palais, du marbre le plus blanc, surpassait en éclat les constructions de neige auxquelles, dans son enfance, M. Amas-d’Or ne dédaignait pas de travailler de ses propres mains, et qu’un rayon de soleil suffisait à fondre.

Le portique, richement orné de magnifiques sculptures, était soutenu par de majestueuses colonnes et encadrait une large porte garnie de clous d’argent et faite d’un bois précieux, venu de par delà les mers. Les fenêtres étaient closes par des glaces sans tain d’une dimension extraordinaire et d’une si grande pureté qu’elle égalait, si elle ne la surpassait, la transparence de l’atmosphère. Personne, à la vérité, n’avait été admis à voir l’intérieur de l’édifice ; cependant on prétendait qu’il était encore plus somptueux que l’extérieur, d’autant plus que le fer et le cuivre ordinairement employés dans les demeures les plus luxueuses, étaient ici remplacés par des métaux précieux. La chambre à coucher de M. Amas-d’Or était surtout si éblouissante, si étincelante qu’un homme ordinaire n’eût pu s’y endormir ; mais son propriétaire était tellement habitué à la vue de l’or, que peut-être ne pouvait-il plus fermer les yeux sans s’être rassasié de ses lueurs rutilantes.

Au terme fixé, la nouvelle demeure fut achevée ; ce fut alors le tour des tapissiers qui apportèrent les plus riches tentures, puis une armée de serviteurs noirs et blancs venus en éclaireurs et qui annoncèrent la glorieuse arrivée de M. Amas-d’Or pour le coucher du soleil.

Cependant notre jeune ami se sentait profondément ému en pensant que le grand homme, l’homme vertueux,