Page:Hawthorne - Le Livre des merveilles, seconde partie, trad. Rabillon, 1882.djvu/335

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et avec tous leurs bras, ils n’avaient chacun qu’un seul cœur, à peu près égal pour la grosseur et la bravoure à celui d’un homme ordinaire. Encore, s’ils avaient ressemblé à Briarée aux cent bras, les Argonautes auraient eu à soutenir un combat digne d’eux. Jason et ses compagnons allèrent hardiment à leur rencontre, en tuèrent la majeure partie, et mirent les autres en fuite ; de façon que, si ces monstres eussent été pourvus de six jambes au lieu de six bras, cet avantage leur eût été favorable pour opérer leur retraite.

Il arriva une autre aventure aux voyageurs à leur arrivée en Thrace. Ils trouvèrent dans ce pays un pauvre roi aveugle nommé Phrinéus, abandonné de ses sujets et vivant solitaire, d’une manière tout à fait déplorable. Jason lui ayant demandé s’ils pouvaient lui rendre quelque service, le roi répondit qu’il subissait des tourments horribles de la part de trois abominables créatures, des Harpies, les appelait-il, qui avaient des visages de femmes, avec des ailes, des corps et des serres de vautours. Ces monstrueuses productions de la nature lui arrachaient ordinairement son repas et ne lui laissaient aucune tranquillité.

Ce récit inspira aux Argonautes l’idée de dresser sur le bord de la mer un abondant festin, persuadés, d’après ce que racontait le malheureux prince sur leur voracité, que les Harpies, alléchées par