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Page:Hawthorne - Le Livre des merveilles, seconde partie, trad. Rabillon, 1882.djvu/73

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Thésée se fût reproché de la presser davantage. Il n’avait donc plus qu’à prendre affectueusement congé d’Ariane, à se rendre à bord et à mettre à la voile.

Une brise légère et fraîche s’éleva comme ils sortaient du port, et bientôt la proue du vaisseau fendit l’onde bouillonnante. Talus, l’homme de bronze, sentinelle constante de l’île, accomplissait en ce moment sa garde régulière de la côte. Les fugitifs aperçurent dans le lointain sa surface polie, qui reflétait l’éclat de la lune. Cependant le géant s’avance comme le ferait une grande machine à ressorts, sans pour cela retarder ni précipiter la marche de l’embarcation. Il arrive, quand déjà les voyageurs sont hors de sa portée. Talus, néanmoins, brandit sa massue, en franchissant à pas immenses et mesurés les pics et les promontoires des falaises ; puis, calculant mal la distance, abat son arme dans la direction du navire ; mais le coup porte à faux et il tombe lui-même de toute sa hauteur dans les flots, qui engloutissent son corps gigantesque, en lançant au loin d’énormes tourbillons d’écume. On eût dit une montagne de glace s’abîmant dans l’Océan.

C’est là qu’il est resté depuis ; et quiconque désire se procurer du bronze n’a qu’à se rendre sur ce point ; au moyen d’une cloche à plongeur, il extraira autant qu’il voudra de ce métal précieux.