La nuit était longue, la nuit était froide ; les marches de pierre étaient froides aussi ; ma bien-aimée guettait à la fenêtre, son blanc visage éclairé par la lune.
Que veut cette larme solitaire ? Elle me trouble la vue. C’est une larme d’autrefois, demeurée là sous ma paupière.
Elle avait bien des sœurs brillantes qui toutes se sont en allées, en allées dans la nuit et le vent, avec mes chagrins et mes joies.
Les petites étoiles bleues se sont évanouies comme des nuées, les souriantes petites étoiles qui m’avaient mis au cœur ces joies et ces chagrins.
Hélas ! mon amour lui-même s’est dissipé comme un vain souffle ! Vieille larme solitaire, évanouis-toi donc aussi !
Le pâle croissant d’automne épie derrière les nuages ; toute seule, proche du cimetière, est située la maison du pasteur.
La mère lit dans la Bible ; le fils a les yeux sur la lampe ; tombant de sommeil, la sœur aînée s’allonge ; la sœur cadette dit :
« Dieu ! comme on s’ennuie ici ! C’est seulement aux enterrements qu’il y a quelque chose à voir. »
La mère, sans lever les yeux : « Tu te trompes ; il n’est mort que quatre personnes depuis que ton père a été enterré, là, près de l’entrée du cimetière. »
La fille aînée bâille : « Je ne veux pas mourir de faim chez vous. J’irai demain chez le comte, qui est amoureux et riche. »
Le fils éclate de rire : « Il y a à l’auberge de l’Étoile trois chasseurs qui font ripaille ; ils savent faire de l’or et m’apprendront volontiers leur secret. »
La mère lui lance sa Bible au visage : « Tu veux donc, garnement maudit, faire un voleur de grande route ! »