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Page:Heine - Œuvres de Henri Heine, 1910.djvu/135

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vers les étoiles. — « Mais dis-moi, & ma bien-aimée, ne m’as-tu pas fait un faux serment ? »

— « La fausseté n’est point en moi, ô mon bien-aimé, non plus que dans mon cœur ne coule une seule goutte du sang des Mores ou des Juifs maudits. »

— « Laisse là les Mores et les Juifs, » repartit le chevalier d’une voix caressante ; et il entraîna la fille de l’alcade sous un bosquet de myrtes.

Dans les doux filets de l’amour il l’avait tendrement enlacée : De courtes paroles, de longs baisers, et les cœurs débordèrent.

Le rossignol fit entendre un mélodieux épithalame ; comme pour exécuter une danse aux flambeaux, les vers luisants sautillèrent dans l’herbe.

Le feuillage était silencieux, et l’on n’entendait, comme à la dérobée, que le chuchotement discret des myrtes et les heureux soupirs des amoureux.

Mais des sons de trompettes et de cymbales retentirent tout à coup du château, et dona Clara, au bruit de ces fanfares, se dégagea soudain des bras du chevalier.

— « Écoute ! Ces fanfares m’appellent, ô mon bien-aimé ! mais avant que nous nous séparions, il faut que tu me dises ton nom chéri, que tu m’as caché jusqu’ici. »

Et le chevalier, souriant avec sérénité, baisa les doigts de sa dame, baisa ses lèvres, baisa son front, et prononça ces paroles :

— « Moi, votre amant, Senora, je suis le fils du docte et glorieux don Isaac-Ben-Israël, grand rabbin de la synagogue de Saragosse. »



ALMANSOR


1

Dans le dôme de Cordoue s’élèvent treize cents colonnes, treize cents colonnes gigantesques soutiennent la vaste coupole.