Page:Heine - Œuvres de Henri Heine, 1910.djvu/241

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Mes enfants, soyez en garde contre ces avortons sans poils ! Mes filles, ne vous fiez à aucun de ces monstres qui portent pantalons !…

Je ne divulguerai pas davantage combien le vieil ours, dans sa rage égalitaire, trouva d’arguments insolents contre le genre humain.

Car, à la fin, je suis homme aussi moi-même, et je ne veux plus répéter ces sottises qui finissent par blesser.

Oui, je suis homme, et je m’estime quelque chose de mieux que les autres bêtes. Jamais je ne trahirai les intérêts de ma naissance ;

Et je défendrai toujours bravement contre toutes les prétentions bestiales le drapeau de l’humanité et les imprescriptibles droits de l’homme.


6

Pourtant, il est peut-être utile aux hommes, qui forment la classe élevée de la société animale, de savoir ce que l’on dit et pense au-dessous d’eux.

Oui, sous nos pieds, dans les couches souterraines, dans les antres ténébreux des classes inférieures et fauves, couvent la misère, l’orgueil et la haine.

Ce qui a été établi par l’histoire naturelle et consacré, depuis des siècles, par les coutumes et les traditions, est nié audacieusement et le museau levé.

Le vieillard grogne à l’oreille de l’adolescent la funeste doctrine qui menace d’anéantir sur terre la civilisation et l’humanité.

— Enfants, (murmure Atta Troll en se roulant sur sa couche sans tapis, ) enfants, l’avenir est à nous !

Si tous les ours, si tous les animaux pensaient comme moi, avec nos forces réunies nous déferions nos tyrans.

Que le brave sanglier s’unisse au noble cheval, que l’éléphant enlace fraternellement sa trompe formidable à la corne du vaillant taureau ;