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Là, sur le versant le plus rapide, la bicoque qu’habite Uraka regarde sournoisement dans la vallée : c’est là que je suivis Lascaro.

Dans la langue mystérieuse des signes, il tint conseil avec sa mère sur la manière dont nous pourrions attirer et tuer Atta Troll.

Car nous avions bien suivi la piste du fugitif ; il ne pouvait plus nous échapper. Tes jours sont comptés, Atta Troll.

Si la vieille, si Uraka est réellement une sorcière des plus distinguées, comme on le prétend dans toutes les bourgades des Pyrénées,

C’est ce que je ne déciderai jamais. Tout ce que je sais, c’est que son extérieur n’est guère rassurant. Ses yeux rouges pleurent d’une façon fort suspecte.

Son regard est louche et méchant, et l’on dit qu’aux pauvres vaches qu’elle regarde, le lait tarit soudain dans les mamelles.

On assure même qu’elle a tué maint gras cochon, et jusqu’aux bœufs les plus forts, rien qu’en les caressant de sa main sèche.

Elle a été aussi plus d’une fois accusée d’un pareil maléfice devant le juge de paix. Mais c’est un voltairien, un enfant du siècle,

Léger, frivole, sceptique, sans croyance, et les demandeurs ont été renvoyés avec des railleries.

Officiellement Uraka a un métier fort honnête. Elle vend des simples des montagnes et des oiseaux empaillés.

La cabane était pleine de pareils objets d’histoire naturelle. On sentait cruellement la jusquiame, le coucou, le pissenlit et la fougère.

Il y avait une collection de vautours qui faisaient le plus bel effet avec leurs ailes étendues et leurs becs gigantesques.

Était-ce la folle odeur de ces plantes qui me montait à la