Page:Heine - Poëmes et légendes, 1861.djvu/225

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pure, qui ne s’est pas laissé dérober la couronne virginale.

« Quand j’entends cette sotte chanson je m’arracherais bien ma barbe blanche et vraiment je serais tenté de me noyer dans mes propres flots.

« Les Français le savent bien que je ne suis pas une pucelle. Ils ont si souvent mêlé à mes flots leurs eaux victorieuses.

« Quelle sotte chanson ! Et quel sot rimeur que ce Nicolas Becker avec son Rhin libre ! Il m’a affiché de honteuse façon. Il m’a même d’une certaine manière compromis politiquement.

« Car quand un jour les Français reviendront, il me faudra rougir de honte devant eux, moi qui tant de fois, pour leur retour, ai prié le ciel avec des larmes.

« Je les ai toujours tant aimés, ces gentils petits Français. Chantent-ils, dansent-ils encore comme autrefois ? Portent-ils encore des pantalons blancs ?

« Je serais heureux de les revoir ! Mais j’ai peur de leur persiflage à cause de cette maudite chanson, j’ai peur de la raillerie et du blâme qu’ils m’infligeront.

« Alfred de Musset, ce méchant garnement, viendra peut-être à leur tête en tambour et me tambourinera aux oreilles toutes ses mauvaises plaisanteries. »

— Telle fut la plainte du vieux fleuve, du père