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II

EN MAI

Les amis que j’ai embrassés, que j’ai aimés, m’ont fait subir les plus indignes traitements. Mon cœur se brise ; là-haut cependant le soleil salue en riant le mois de la volupté.

Le printemps est en fleurs. Dans la verte forêt résonne le chant joyeux des oiseaux, et fleurs et jeunes filles sourient d’un sourire virginal ; — ô monde charmant, tu es hideux !

Je serais vraiment tenté de louer l’Orcus ; là jamais de contraste impertinent qui nous mortifie. Pour les cœurs souffrants, la place est bien meilleure, là-bas, au bord des eaux nocturnes du Styx.

Son bruissement mélancolique, le cri rauque et désolé des Stymphalides, le chant des Furies, si aigu, si strident, et au milieu de tout cela les aboiements de Cerbère —

Tout cela forme une lugubre harmonie avez le malheur et la tristesse. Dans la sombre vallée de l’empire des ombres, dans les domaines maudits de Proserpine, tout est d’accord avec nos larmes.