Page:Heine - Poëmes et légendes, 1861.djvu/385

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Elle aime le génie qui n’est pas éloigné de la nature, qui ne tire pas vanité de l’érudition, et qui en effet n’a jamais rien appris.

Tel est le programme de la société philharmonique des matous, et dans l’enthousiasme de ses idées elle a donné cette nuit son premier concert d’hiver sur le toit.

Prodigieusement effroyable fut l’exécution de la grande pensée, du programme pompeux. — Pends-toi, mon cher Berlioz, tu n’y étais pas !

C’était un charivari, comme si trente-six joueurs de cornemuse enivrés d’eau-de-vie eussent commencé leur bastringue.

C’était un tohu-bohu comme si dans l’arche de Noé tous les animaux à l’unisson eussent entonné la Marseillaise du déluge.

Oh ! quels croassemenls ! quels hurlements ! quels grognements ! quels miaulements ! les vieux tuyaux de cheminée se mettaient de la partie et ronflaient des chorals d’église.

On distinguait surtout une certaine voix à la fois criarde et terne, comme était la voix de la Sontag quand elle n’avait plus de voix.

Quel concert diabolique ! je crois qu’on chantait un grand Te Deum pour célébrer la victoire du délire sur le bon sens.