Aller au contenu

Page:Hello-Les Plateaux de la balance, Perrin, 1923.djvu/102

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

êtes tenu au plus profond respect vis-à-vis de tout ce qui est méprisable.

Peut-être Shakspeare fournit-il à cette vérité générale une de ses applications les plus précises. Je ne pense pas qu’il existe un libre penseur qui ose se dispenser d’admirer Shakspeare.

On a beaucoup usé de Shakspeare. Hamlet, le Roi Lear, Roméo et Juliette brillent à chaque instant sur l’affiche des théâtres. On dirait des pièces nouvelles ; c’est la parodie d’une jeunesse éternelle. Il serait facile à un regard superficiel de tirer de là, en faveur du poète anglais, des conclusions énormes. Mais le point de vue change, si la profondeur intervient.

Il y a un homme qui a prononcé la condamnation de Shakspeare. Cet homme est nécessairement un de ses plus fanatiques adorateurs : c’est M. Victor Hugo. C’est celui-là même qui admire tout dans le poète anglais

Je m’adresse donc à cet ami féroce, plus cruel qu’un ennemi, et même plus cruel qu’un ennemi déguisé, et je lui demande ce qu’est son idole, et l’adorateur me répond :

« Qu’est-ce que la Tempête, Troïlus et Cressida, les Gentilhommes de Vérone, les Commères de Windsor, le Songe d’été, le Songe d’hiver ? C’est la fantaisie, c’est l’arabesque. »

C’est la fantaisie. Arrêt terrible porté par la main un peu lourde, quoiqu’un peu légère, d’un dangereux idolâtre. La critique la plus « sévère n’oserait pas aller si loin. Je ne suis