Page:Helvétius - Œuvres complètes d’Helvétius, tome 6.djvu/105

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y marchoit d’un pas assuré, lorsqu’il trouve sur son passage, et reconnoît sous l’habit de bramine, un de ceux qui s’étoient séparés de lui dans le désert. Le peuple, avec respect, entouroit le bramine, et le portoit dans sa pagode. Le brigand s’arrête à son aspect : Dieux justes ! s’écrie-t-il ; égaux en crimes, quelle différence entre nos destinées ! Que dis-je ? égaux en crimes ! En un jour, il a, sans crainte, sans danger, sans courage, plus fait gémir de veuves et d’orphelins, plus enlevé de richesses à l’empire, que je n’en ai pillé dans le cours de ma vie. Il eut toujours deux vices plus que moi, la lâcheté et l’imposture. Cependant l’on me traite de scélérat, on l’honore comme un saint ; l’on me traîne à l’échafaud, on le porte dans sa pagode ; l’on m’empale, on l’adore.