Page:Henri Béraud - Le Martyre de l'obèse, 1922.djvu/64

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lement. Mais tandis qu’il me tendait mon pyjama, je pensais :

— Je vais revenir gentiment à mon tran-tran, à ma brave existence de bouffi sympathique et pas contrariant.

Après tout, je devais laisser un vide. Les amis de jeunesse ne se remplacent pas, et les miens commençaient, bien sûr, à trouver que les gros garçons, bons buveurs, égaux de caractère et toujours prêts à la vadrouille, sont tout de même, à Paris, moins nombreux que les tapeurs et les mufles. Oui, bien sûr, ils m’attendaient. J’irais le soir même au Chatham. Déjà, j’entendais ce vieux Rouquayrol s’écrier à ma vue :

— On l’aime trop pour tuer le veau gras !

Et Michel ajoutait entre deux bouffées de cigare :

— Pour célébrer son retour, nous allons en embrasser chacun un morceau.

Tels sont mes amis. Ils n’épargnent pas ma graisse, car ils sont hommes et parce qu’on leur