Page:Henri IV - Lettres Missives - Tome1.djvu/372

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sorte qu’il falloit se contenir dans les limites d’iceluy ou rompre. Et voyant qu’il avoit esté dressé avec l’advis commun de tous, et que chascun s’en contentoit, s’il eust esté bien executé, qu’il ne restoit que l’esclaircissement et l’amplification de quelques articles dont j’avois eu les memoires de Paris et de plusieurs provinces, je me suis mis en lice avec ceulx que j’avois peu assembler, tant de Guyenne que de Xaintonge, Poictou, la Rochelle, Quercy, haut Languedoc et aultres endroicts, qui peuvent rendre tesmoignage de quelle foy nous y avons marché. Les chemins estoient longs et dangereux pour les aultres provinces, qui neantmoings y eussent peu arriver à temps, ayant la conference duré plus de deux mois, despuis les avoir mandez. Quant à mon dict cousin, je n’avois oy de ses nouvelles despuis son retour d’Angleterre, et estois incertain du lieu de son sejour. J’avois d’aultre part advis qu’il n’y avoit rien de prest pour nostre secours estranger ; et toutesfois je n’ay laissé de faire en ce traicté, pour ce qu’il les touchoit, aultant que s’ils y eussent esté eux-mesmes. Cependant je cognois qu’il en y a qui taschent à leur faire trouver maulvais, et les induire, s’ils pouvoient, à quelque desunion[1].

Je vous prie, monsieur de Besze, poiser toutes ces choses, par vostre prudence, auxquelles je pourrois adjouster beaucoup de considerations qu’il n’est besoing d’escrire, et prendre ceste cause en main à l’encontre de tels esprits. Ceste paix n’est point desavantageuse ; il est besoing que chascun la reçoive et embrasse pour le restablissement de nostre religion ; estant adverty de plusieurs de nos ministres, qu’il vauldroit mieulx retourner encore aux feux qui

  1. Le prince de Condé, à qui sa bouillante valeur, son active énergie, plus grande encore peut-être que celle de son cousin, et le souvenir de son père, donnaient un grand relief auprès des ministres protestants, était le véritable favori de leur parti. On peut dire que dans les efforts désespérés qu’il venait de faire pour rallier de toutes parts des secours étrangers, il s’était montré meilleur huguenot que Français ; cela même était un titre de préférence auprès des ministres fervents comme de Bèze. Cette situation explique le ton de déférence extrême et presque de justification que prend ici le roi de Navarre.