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Page:Henri IV - Lettres Missives - Tome2.djvu/465

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I- DU ROI DE NAVARRE. A55 subjects? Ce seroit trop. C’est un mal-beur ; c’est’unè rage que Dieu _ a envoyée en ce Royaume, pour nous punir de nos faultes, Il le fault oublier, il le fault pardonner, et ne sçavoir non plus mauvais gré à .nos peuples, à nosvilles, qu’à ung furieux quand il frappe, qu'à ung insensé quand il se promene tout nud. Soit au contraire, si ceulx de _la Ligue se fortifient tellement, qu’ils luy resistent, comme certes il y a apparence (et j’ay peur que sa patience soit leunprincipale force, Dieu voulant peut-estre exercer sur nous des jugemens que nous ne sçavons pas), que sera-ce de nous et de luy? Que dirons- nous des Francois? Quelle honte que nous ayons chassé nos Roys! tache qui ne souilla jamais la rohbe de nos peres, et le seul advan- tage que nous avons sur tous les vassaulx de la Chrestienté! Cependant n’est-ce pas un grand mal-heur pour moy que je sois contrainct de demeurer oisif? On m’a mis les armes en main par force. Contre qui les employeray-je à cette heure? Contre 1non Roy? Dieu luy a touché le cœur. Faisant pour luy, il a faict pour moy contre ceulx de la Ligue. Pourquoy les mettrois-je au desespoir? Pourquoy, moy qui presche la paixen France, aigrirois-je lehoy, ` contre eux, et osteroisje, par Yapprehension de mes forces, à luy ' l’envie, à eux l'esperance de reconciliationP Et voyés ma peine ; car, si je demeure oisif, il est à craindre qu’ils fassent encores quelque ac- cord, et à. mes despens, comme j’ay ve11 deux ou trois fois advenir ; ou qu’ils alfoiblissent tellement le Roy, et se rendent si forts, que moy, aprés sa ruine, n’auray gueres de force ny de volonté pour em— pescher la mienne. A Messieurs, je parle ainsy à vous, que J sçay, a mon tres grand regret, n’estre tous composez d'une humeur. Les declarations du Boy, mon seigneur, et principalement ses dernieres, publient assés qu'il y en avoit entre vos deputez, et quasi la plus grande partie, à la devotion d’aultre que de luy. Si- vous avés tant soit peu de juge- ment, vous conclurés avec moy que je suis en grand hazard. Aussi est le Roy ; aussi est le troisiesmeparty ; aussi estes—vous, et en gros et en detail. Nous sommes dans une maison qui va fondre, dans ung