Page:Henri Poincaré - Dernières pensées, 1920.djvu/214

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et dont le moindre est de traverser une foule de sujets divers sans avoir le temps de m'y arrêter.

Une première réflexion a dû frapper tous les auditeurs ; les anciennes hypothèses mécanistes et atomistes ont pris dans ces derniers temps assez de consistance pour cesser presque de nous apparaître comme des hypothèses ; les atomes ne sont plus une fiction commode ; il nous semble pour ainsi dire que nous les voyons, depuis que nous savons les compter. Une hypothèse prend du corps et gagne en vraisemblance quand elle explique de nouveaux faits ; mais cela arrive de bien des façons ; le plus souvent elle doit s'élargir pour rendre compte des faits nouveaux ; mais tantôt elle perd en précision en s'élargissant, tantôt il est nécessaire de greffer sur elle une hypothèse accessoire qui s'y adapte d'une façon plausible, qui ne jure pas trop avec le porte-greffe, mais qui n'en est pas moins quelque chose d'étranger, d'imaginé tout exprès en vue du but à atteindre, qui est en un mot une sorte de coup de pouce ; dans ce cas on ne peut pas dire que l'expérience a confirmé l'hypothèse primitive, mais tout au plus qu'elle ne l'a pas contredite. Ou bien encore, il y a entre les faits nouveaux et les faits anciens, pour lesquels l'hypothèse avait été primitivement conçue, une connexion intime et de telle nature que toute hypothèse qui rend compte des uns doit par cela même rendre compte des