Page:Henri Poincaré - Dernières pensées, 1920.djvu/223

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de peu d'éléments obéira à des lois plus ou moins compliquées, mais qui ne seront pas des lois statistiques. Il faut donc que l'atome soit un monde complexe ; il est vrai que c'est un monde fermé (ou tout au moins presque fermé), il est à l'abri des perturbations extérieures que nous pouvons provoquer ; puisqu'il y a une statistique et par conséquent une thermodynamique interne de l'atome, nous pouvons parler de la température interne de cet atome ; eh bien ! elle n'a aucune tendance à se mettre en équilibre avec la température extérieure, comme si l'atome était enfermé dans une enveloppe parfaitement adiathermane. Et c'est précisément parce qu'il est fermé, parce que ses fonctions sont nettement tracées, gardées par des douaniers sévères, que l'atome est un individu.

Au premier abord, cette complexité de l'atome n'a rien de choquant pour l'esprit ; il semble qu'elle ne doive nous causer aucun embarras. Mais un peu de réflexion ne tarde pas à nous montrer les difficultés qui nous échappaient d'abord. Ce qu'on a compté, en comptant les atomes, ce sont les degrés de liberté ; nous avons implicitement supposé que chaque atome n'en a que trois ; c'est ce qui nous rend compte des chaleurs spécifiques observées ; mais chaque complication nouvelle devrait introduire un degré de liberté nouveau, et alors nous sommes loin de compte. Cette difficulté n'a pas