Page:Henri Poincaré - Dernières pensées, 1920.djvu/34

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nous voyons sortir des êtres semblables, mais que la température extérieure n’était pas trop élevée pour que ce germe pût se développer. Autrement ces débris ne pourraient être qu’un ludus naturæ, comme on le croyait au XVIIe siècle ; et il est inutile de dire qu’une pareille conclusion choque absolument la raison. L’existence de débris organisés n’est d’ailleurs qu’un cas extrême plus frappant que les autres, et sans sortir du monde minéral, nous aurions pu citer des exemples du même genre.

Le géologue peut donc conclure, là où le mathématicien serait impuissant. Mais on voit qu’il n’est plus garanti contre la contradiction comme l’était le mathématicien. Si d’une circonstance unique, il conclut à des circonstances antérieures multiples ; si l’étendue de la conclusion est en quelque sorte plus grande que celle des prémisses, il est possible que ce que l’on déduira d’une observation se trouve en désaccord avec ce qu’on tirera d’une autre. Chaque fait isolé devient pour ainsi dire un centre d’irradiation : de chacun d’eux le mathématicien déduisait un fait unique ; le géologue en déduit des faits multiples ; du point lumineux qui lui est donné, il fait un disque brillant plus ou moins étendu ; deux points lumineux lui donneront alors deux disques qui pourront empiéter l’un sur l’autre, d’où la possibilité d’un conflit. Par exemple s’il