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AVANT-PROPOS.


AVANT-PROPOS.

Les méthodes que je vais exposer dans ce second Volume sont dues aux efforts d’un grand nombre d’astronomes contemporains, mais c’est à l’exposition de celles de M. Gyldén, qui sont les plus parfaites, que je consacrerai le plus de pages.

Toutes ces méthodes ont un caractère commun ; les savants qui les ont imaginées se sont efforcés de développer les coordonnées des astres en séries dont tous les termes soient périodiques et de faire disparaître ainsi les termes dits séculaires que l’on rencontrait avec les anciens procédés d’approximation successive, et où le temps sortait des signes sinus et cosinus ; mais, en revanche, ces savants ne se sont pas préoccupés de savoir si les séries qu’ils obtenaient étaient convergentes au sens que les géomètres donnent à ce mot.

Aussi, tandis que les résultats obtenus dans le premier Volume étaient établis avec toute la rigueur à laquelle les mathématiciens sont accoutumés, ceux que je vais exposer ne sont vrais qu’avec une certaine approximation, qui est certainement très grande, d’autant plus grande que les masses sont plus petites. Il est très difficile de mesurer exactement, dans chaque cas, l’erreur ainsi commise, mais on peut en trouver une limite supérieure, qui, il est vrai, est probablement très grossière.

Les termes de ces séries, en effet, décroissent d’abord très rapidement et se mettent ensuite à croître ; mais, comme les astronomes s’arrêtent aux premiers termes de la série et bien avant que ces termes aient cessé de décroître, l’approximation est suffisante pour les besoins de la pratique. La divergence de ces développements n’aurait d’inconvénient que si l’on voulait s’en servir pour établir rigoureusement certains résultats, par exemple la stabilité du système solaire.

Dans le Chapitre VIII, je cherche à expliquer en quoi consiste ce malentendu entre les géomètres et les astronomes ; comment certaines séries que les premiers appellent divergentes peuvent rendre des services à ces derniers ; comment les règles ordinaires du calcul sont applicables à ces séries. Les méthodes peut-être un peu longues qui me conduisent à ce dernier résultat ont l’avantage de montrer comment on pourrait trouver une limite supérieure de l’erreur ; on pourra du reste rapprocher ce Chapitre VIII de la discussion qui se trouve à la fin du Chapitre VII.

Dans les Chapitres suivants, j’expose les plus simples des méthodes nouvelles, celles qui sont dues à MM. Newcomb et Lindstedt. Je montre comment on peut triompher de certaines difficultés que l’on rencontre quand on veut les appliquer au cas le plus général du Problème des trois Corps.

Ces difficultés sont au nombre de deux : d’abord, pour que la méthode de M. Lindstedt soit applicable, soit sous sa forme primitive, soit sous celle que je lui ai ensuite donnée, il faut qu’en première approximation les moyens mouvements ne soient liés par aucune relation linéaire à coefficients entiers ; or, dans le Problème des trois Corps, les moyens mouvements qui doivent entrer en ligne de compte sont, non seulement ceux des deux planètes, mais encore ceux des périhélies et des nœuds. Mais, en première approximation, c’est-à-dire dans le mouvement képlérien, les périhélies et les nœuds sont fixes : leurs moyens mouvements sont donc nuls et la condition que j’ai énoncée plus haut, c’est-à-dire l’absence de toute relation linéaire à coefficients entiers, n’est pas remplie. Après avoir expliqué comment on peut diriger les approximations suivantes de façon à échapper à cet inconvénient, je passe à une seconde difficulté qui se présente quand les excentricités sont extrêmement petites. Je montre qu’elle est artificielle et qu’on l’évite en prenant pour point de départ, non pas les cercles auxquels se réduisent les ellipses képlériennes quand les excentricités sont nulles, mais les orbites décrites par nos planètes dans le cas des