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SULLY PRUDHOMME

étoiles gagnent sans doute à être vues de loin.

Ce qui demeure, c’est la conscience de l’homme et c’est là que l’idée de justice a son unique asile. Peut-être triomphera-t-elle un jour ; mais l’homme est venu trop tôt, ou trop tard et c’est pour cela qu’il se sent éternellement exilé. C’est la nature cependant qui a fait l’homme ; avait-elle oublié pour un jour son indifférence morale ? ou bien de même qu’elle avait donné au lion la cruauté utile au carnivore, a-t-elle donné à l’homme la conscience morale nécessaire à la conservation d’une espèce qui doit vivre en société.

C’est en ce sens que les aspirations de cette conscience sont d’accord avec les secrets desseins de la nature. Le poète se contente de cette explication et, délivré de l’angoisse, il entonne un chant d’allégresse, peut-être prématuré, car le vrai problème, le plus douloureux, n’est pas abordé. Est-il possible de discerner où est la justice ? Peut-on concevoir une justice qui ne soit pas injuste que par quelque côté ?

Après la Justice, le poète cherche le Bon-