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Page:Henriet - Le paysagiste aux champs, 1876.djvu/213

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LE PAYSAGISTE AUX CHAMPS.


inerte. La nature n’a pas d’âme. C’est nous qui lui prêtons la nôtre. L’art, c’est la conjonction idéale de notre âme avec la nature…

A l’âge où nous nous enivrons d’espérances, nous voulons le paysage dans tout l’éblouissement de ses verts atours ; quand nous commençons à vivre du passé, nous inclinons vers les mélancolies du gris : les souvenirs portent toujours un peu le deuil, et le gris est la couleur des cendres…

A l’exemple des jeunes Gusmans de la palette, le peintre amateur est un croyant du soleil, — du moins, un croyant sui generis. Le soleil est une des pièces capitales de son outillage. Quand le ciel est au bleu fixe, l’amateur s’arme de son attirail, d’un aspect toujours neuf, — tant il est soigneusement entretenu, — et part triomphant. Mais le ciel se couvre de nuages, les valeurs du paysage deviennent indécises et changeantes. L’amateur y perd son latin, — car il sait toujours plus ou moins de latin, l’amateur. — Il se replie sans avoir attouché sa palette, parcimonieusement