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MAJOGBÉ.

le sauver, de le protéger, puis de le faire encore plus riche, de lui donner beaucoup d’huile, et des étoffes, et des métaux précieux ; il lui demandait surtout de le conserver puissant jusqu’à la dernière heure pour que ses enfants lui fissent de belles funérailles. Si, après avoir adoré son bâton en ces nuits de mauvais augure, la peur ne le quittait point, Elado tenait à la main un petit fétiche de fer à chaînettes et l’agitait. Il espérait ainsi ne pas être la victime des sorciers qui tuent à distance par leurs charmes.

Cette crainte lui avait été donnée par des Gambaris. Ces hommes jaunes, venus du Nord, possédaient de terribles sortilèges. Ils fabriquaient des statuettes de terre à la ressemblance de ceux qu’ils voulaient frapper et les jetaient dans leur feu en appelant les mauvais esprits… Si à ce moment les génies protecteurs n’étaient pas invoqués par celui qu’on vouait à la mort, cet homme mourait.

Elado savait que, pour une offense légère, le balé d’une ville avait été tué de la sorte par des.jongleurs du Nord. C’est pourquoi il les protégeait. Il leur avait permis de s’établir avec leurs dieux à Aké et de construire un temple où ils adoraient des fétiches qu’ils disaient meilleurs que ceux de tous les autres peuples. Quand, pour les fêtes et les sacrifices, leur chef avait besoin de moutons ou de jeunes chevreaux, Elado lui en donnait toujours.

Le peuple, excité contre ces étrangers par les féticheurs de l’Oluman, demandait un jour qu’on