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Page:Hirsch - Un vieux bougre, 1908.djvu/51

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UN VIEUX BOUGRE

d’antan, et lui, que la fatigue avait ramené dans sa Beauce pour y mourir en paix, la fringale du nouveau le prenait, son esprit lui commandait l’action.

— Vous allez ben manger la soupe avec nous, l’père ? lui proposa sa bru.

Il sembla ne point la reconnaître, d’abord ; puis, se levant, il dit :

— C’est pas d’soupe, que j’ai faim…

— Pensif, il s’en fut chausser ses sabots et prendre son bâton.

— Ça pleut’cor’, l’père’avertit Michel.

— J’suis pas tout sucre, répliqua le vieux.

Du seuil, ayant enfoncé son chapeau dont il rabattit le bord sur son front, il annonça :

— Une idée à moi… qu’j’irais voir le p’tit et sa garce, là-bas…

— Hein ? À vot’âge, l’père ! s’écria la femme.

Et Michel surenchérit :

— C’est près Paris qu’y sont… et dam’ ! y a bonne distance…

Gaspard les toisa. Comme on jette un os au chien, il leur donna le bonsoir et il sortit sous l’averse, très droit.