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Page:Histoire de Mademoiselle Brion, dite Comtesse de Launay, 1754.djvu/28

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HISTOIRE

un inſtant de plus, mon être n’auroit pu y ſuffire ; le plaiſir m’eût anéantie. J’ouvris enfin les yeux pour lire dans ceux de Mr. de R.... toutes les ſenſations qu’il éprouvoit : une tendre langueur les tenoit à moitié fermés : la volupté ſatisfaite y étoit peinte. Nous fumes long-tems à nous regarder, ſans avoir la force de prononcer une parole. Il rompit le premier le ſilence, & ce fut pour peindre ſon bonheur. Un baiſer enflammé que je lui donnai, me tint lieu d’éloquence, & l’aſſura du plaiſir que j’avois eu à le partager.

Il commençoit à être tard : Mr. de R.... me demanda ſi je ne trouvois pas qu’il fût à propos de ſe mettre à table, & donna des ordres pour que l’on ſervît. Notre tête-à-tête fut des plus gais : des mêts auſſi délicatement préparés, que proprement ſervis, conduiſirent notre ſoupé très-avant dans la nuit : le