Page:Histoire de l'Académie Royale des Sciences et des Belles Lettres (1746).djvu/310

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teint l’un des Globes de quelque couleur qui puisse s’effacer & tacher l’autre : on voit par la grandeur de la tache, que les Globes se sont applatis pendant le choc, quoi qu’après il ne soit resté aucun changement sensible à leur figure.

On ajoûte à ces expériences des raisonnemens métaphysiques : on prétend que la Dureté prise dans le sens rigoureux, exigeroit dans la Nature des effets incompatibles avec une certaine Loi de Continuité. Il faudroit, dit-on, lors qu’un Corps dur rencontreroit un obstacle inébranlable, qu’il perdît tout à coup sa vîtesse, sans qu’elle passât par aucun autre degré de diminution ; ou qu’il la convertît en une vîtesse contraire, & qu’une vîtesse positive devînt negative, sans avoir passé par le repos.

Mais j’avoue que je sens pas la force de ce raisonnement. Je ne sai si l’on connoît assez la manière dont le Mouvement se produit ou s’éteint, pour pouvoir dire que la loi de continuité fût ici violée : je ne sai pas trop même ce que c’est que cette loi ? Quand on supposeroit que la vîtesse augmentât ou diminuât par degrès, n’y auroit-il pas toûjours des fauts d’un degré à l’autre ? Et des fauts imperceptibles ne violeroient-ils pas autant la continuité que feroit la destruction subite de l’Univers ?

Quant aux expériences qu’on a rapportées ; elles font voir qu’on peut confondre la Dureté avec l’Elasticité ; mais elles ne prouvent pas que l’une ne soit que l’autre. Au contraire dès qu’on a réflechi sur l’impénétrabilité des Corps, il semble qu’elle ne soit pas différente de leur dureté ; ou que la dureté en soit une suite necessaire. Si dans la plûpart des Corps, les parties dont ils sont composés, se séparent ou se plient, cela n’arrive que parce que ces corps sont des amas d’autres corps : les Corps simples, les Corps primitifs, qui sont les élémens de tous les autres, doivent être durs, infléxibles, inaltérables.