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Page:Histoire de l'Entente cordiale franco-anglais - Lanessan - 1916.djvu/209

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LES PREMIERS PAS VERS L’ENTENTE CORDIALE

France ne pouvait exercer aucune influence fâcheuse sur les relations que la dernière entretenait avec l’Angleterre. La reine Victoria, touchée par cette manifestation, tint à recevoir nos marins et, à l’exemple de l’empereur de Russie, elle se leva pour entendre la Marseillaise. C’était le premier pas vers l’Entente cordiale.

La nouvelle attitude du gouvernement britannique s’expliquait par le caractère que Guillaume ii assigna, dès la retraite de Bismarck, à la politique maritime et coloniale de l’Empire germanique. Tant que le chancelier de fer avait dirigé l’empire, il n’avait considéré la marine de guerre que comme une protectrice dont il ne développait la puissance que lentement, soit parce qu’il n’attachait aux flottes de guerre qu’une valeur de second ordre au point de vue de la force militaire de l’empire, soit parce que ne jugeant pas nécessaire de doter l’Allemagne de colonies, il en déduisait l’inutilité d’une grande puissance maritime ; soit encore parce qu’il tenait à éviter de provoquer des inquiétudes en Angleterre. Si le gouvernement britannique, vers la fin de la carrière du chancelier, penchait vers la Triple-Alliance germanique c’est, sans nul doute, parce que la politique coloniale et maritime de Bismarck n’allait à l’encontre d’aucun de ses intérêts. Au contraire, la France et la Russie l’inquiétaient ; la première en raison de son caractère de grande puissance maritime et coloniale, la seconde à cause de ses ambitions orientales et extrême-orientales.

Il était impossible que les sentiments de l’Angleterre ne se modifiassent pas lorsqu’elle vit Guillaume ii tourner ses préoccupations vers la mer, en proclamant sa résolution de donner à l’Allemagne, à la fois, une flotte de guerre qui serait la rivale de celle de l’Angleterre et des colonies que l’empire acquerrait dans toutes les parties du monde.