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CHAPITRE Ier


Dégénérescence de l’ordre cistercien. — La commende.

Nous touchons à une époque critique pour les institutions monastiques ; et le courant fatal qui devait porter une si vive atteinte à leur prospérité morale et matérielle n’épargna point la grande famille cistercienne.

Les causes en furent multiples. La guerre contre les Anglais, qui, pendant si longtemps, ensanglanta le sol de la France ; les compagnies d’aventuriers attirés par l’appât de la solde et utilisant les loisirs des trêves éphémères par la dévastation et le pillage ; le grand schisme d’Occident, divisant la chrétienté en plusieurs obédiences, provoquant de fréquentes dépositions et élections de papes et d’antipapes ; tout semblait conjuré pour troubler profondément la sécurité et la régularité de la vie claustrale et arrêter les vocations jusqu’alors si nombreuses.

À ces causes temporaires de décadence, s’en joignit une autre qui, longtemps combattue et toujours renaissante, finit « par s’attacher définitivement aux flancs de l’ordre cistercien, comme un chancre rongeur, pour en épuiser toute la sève et la vie[1]. » Nous voulons parler de

  1. L’abbé Martin, Les Moines et leur influence sociale ; Paris. 1863. C’est dans cet intéressant ouvrage qu’ont été pris une partie des développements qui suivent.