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Une pétition couverte d’un grand nombre de signatures fut adressée au Sénat en sa faveur, mais elle n’eut même pas l’honneur d’un examen.

Il n’y avait plus à en douter, la royale abbaye d’Hautecombe, l’asile sacré des tombeaux des souverains de Savoie, l’antique fondation d’Amédée III, la maison célèbre qui avait donné deux papes à l’Église et qui venait d’être relevée de ses ruines par Charles-Félix, Hautecombe, dont le nom éveille tant de souvenirs, allait périr de nouveau et, cette fois, sous le règne de l’héritier de ses augustes fondateurs, par les agissements du gouvernement d’un prince à qui Marie-Christine avait légué ses droits sur ce monastère et confié le soin d’accomplir les travaux qu’elle avait projetés[1] !

Le 28 juillet, dans la matinée, deux barques se détachaient du port de Puer, cinglant sur le lac du Bourget, dans la direction de l’abbaye. La première portait le juge du mandement d’Aix, accompagné de deux huissiers et de trois serruriers ou tailleurs de pierre, munis des instruments de leurs professions, de « quelques autres outils moins usités, employés seulement pour soulever la porte d’autrui sans sa permission. » La seconde barque portait l’insinuateur d’Yenne et six carabiniers royaux ou gendarmes.

  1. La loi contre les couvents produisit une impression très pénible en Savoie. Plusieurs fonctionnaires chargés de l’exécuter s’y refusèrent.
    Hautecombe se trouvait dans le mandement du canton de Ruffieux. M. Pavy, juge à ce siège, répondit à l’ordre de prendre possession du monastère par ces nobles paroles : « Il y a vingt-six ans que j’appartiens à l’Église, depuis une année seulement j’appartiens à l’État, mon choix ne peut donc être douteux. » On dut recourir à un autre magistrat.