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Page:Histoire des philosophes modernes, Tome 1, 1773.djvu/9

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Aussi ces Auteurs trouvent ridicule que M. Berkeley s'imagine avoir donné les moyens de fermer la bouche tant aux Athées qu'aux Sceptiques. Voici comment ils s'expriment là-dessus. » Les interlocuteurs des Dialogues, dont nous allons donner l'extrait, sont Hilas et Philon. Le dernier, qui est celui qui triomphe et qui fait tomber l'autre dans son sentiment, soutient qu'il n'y a point de corps, et qu'il ne peut exister que des esprits : il prétend que tout ce que nous nommons corps, ne sont que des idées qui ne peuvent avoir une existence séparée des esprits qui ont ces idées. Notre Auteur croit son sentiment est démontré, qu'il n'a aucun embarras, et qu'il donne le moyen le plus aisé pour fermer la bouche tant aux Athées qu'aux Sceptiques, et pour ramener les hommes des paradoxes au sens commun. » On sera sans doute surpris de la bisarrerie de ce sentiment ; mais la lecture du Livre empêchera qu'on ne le foit de ce que l'Auteur l'a embrassé [1]. Ces Journalistes ont prévenu d'abord au commencement de leur extrait, qu'on voit dans tous les Ouvrages de M. Berkeley, "le caractère d'un Auteur plus attaché à avancer des paradoxes et des sentiments entièrement nouveaux, que soigneux d'examiner les sentiments qu'il réfute" [2]. Et ils le terminent par ces paroles remarquables : » Outre l'argument contre les Athées, M. Berkeley croit trouver dans son sentiment beaucoup d'autres avantages qu'on a point quand on admet l'existence des corps. Les Philosophes sont obligés de dire, qu'ils ne connoissent point la nature des choses ; pour lui il la connoît. Les choses ne sont que les idées qu'il en a ; ainsi le feu est chaud, et les couleurs sont dans les objets ; en quoi il s'accorde, dit-il, avec tous les hommes. M. Berkeley devoit ajouter, pour les mots. Quand un Paysan dit que la blancheur de son cheval est dans le cheval même, et quand M. Berkeley le dit aussi, ont-ils la même idée? Et M. Berkeley qui prétent si fort s'accorder avec ce que le sens commun enseigne à tous les hommes, seroit-il bien reçu de ce Paysan, s'il venait lui soutenir que ce cheval n'existe que dans la tête de ceux qui le regardent ? » L'Auteur prétend faire valoir son système à bien d'autres égards par dessus le sentimnt de ceux qui croient l'existence des corps ; sentiment qui, à ce que dit M. Berkeley, mène à un grand nombre de paradoxes et de conséquences absurdes et insoutenable. C'est sur quoi ne nous arrêtons point : ce que nous avons dit jusqu'ici fait assez voir ce que M. Berkeley veut dire par ces paradoxes

  1. Journal Littéraire, pag. 148 et 149.
  2. Ibid. p.148.