Page:Histoire du donjon de Loches par M. Edmond Gautier.djvu/209

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Le bon roy leur accorde tout ;
Le parlement vérifie tout ;
Le chancelier scelle tout ;
La reine mère conduit tout ;
Le pape leur pardonne tout ;
Chicot tout seul se rit de tout ;
Le Diable à la fin aura tout.

Sa mort fut digne de sa vie. Au mois de décembre 1591, il accompagnait Henri IV au siège de Rouen. « Le comte de Chaligny[1] étant sorti avec 50 chevaux pour reconnaître les logements, les coureurs du roi le chargèrent. Luy se mettant bien avant parmi eux, trouva en teste le bouffon du feu roy Henry III, qui n’étoit pas connu seulement pour ses bons mots, mais aussi pour estre homme de mains, et qui alloit hardiment au combat. Il luy donna un coup d’espée sur la teste, et Chicot luy perça la cuisse d’un autre, dont il le renversa par terre ; mais comme il sceut, par son escuyer qui se jetta dessus pour le couvrir et le nomma, que c’estoit luy, il oublia généreusement sa blessure, dont il mourut quelques jours après, et mettant pied à terre luy sauva la vie et en fit présent au Roy. » (Mézeray)

D’autres prétendent que Chicot, après avoir pris le comte de Chaligny sans se faire connaître, l’amena au roi en lui disant : « Tiens, voilà un prisonnier que je te donne. » Le comte, furieux d’avoir été pris par un bouffon,

  1. Henry de Lorraine, frère utérin de Louise de Lorraine, veuve de Henry III. — Le comte de Chaligny fut fait prisonnier au combat de Bures, en février 1592 (Lettres de Henry IV, dans la collection des Documents inédits). Pierre de l’Estoile, dans son journal de Henry III, place la mort de Chicot au mois d’avril 1592 : « En ce mois, et pendant le siège de Rouen, mourut Chicot, fol du roy, et cependant bon soldat, mais yvrogne. Le roi aimait cest homme tout fol qu’il estoit, et ne trouvoit rien mauvois de tout ce qu’il disoit. »