Page:Histoire romaine de Caius Velleius Paterculus adressée à M. Vinicius, Consul, 1825.djvu/73

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Cette partie de mon ouvrage s’écarte déjà de la forme que je me suis proposée. Je sens qu’entraîné par un mouvement aussi rapide que celui d’un char qui vole, ou d’un torrent qui se précipite, je dois plutôt omettre des détails nécessaires qu’en embrasser de superflus. Cependant, je ne puis ne pas insister ici sur une chose à laquelle j’ai souvent réfléchi, sans me l’être nettement expliquée.

Peut-on s’étonner assez de ce que les plus beaux génies, en différents genres, se rencontrent toujours dans la courte durée d’un même âge ? Qu’on me permette une comparaison : rassemblez dans une même enceinte des animaux d’espèces différentes ; ils s’éloigneront de celle à laquelle ils n’appartiennent point, pour se réunir à la leur. Ainsi, peut-être, les esprits capables de produire se sont-ils séparés des autres, pour atteindre, dans un même temps, un égal degré de perfection. En peu d’années, la tragédie prit l’essor le plus brillant, sous la plume d’Eschyle, de Sophocle et d’Euripide, trois hommes animés d’un souffle divin. En peu d’années, Cratinus, Aristophane, Eupolis perfectionnèrent l’ancienne comédie. Dans un espace de temps assez court, Ménandre, ainsi que Philémon et Diphile, ses contemporains plutôt que ses rivaux, créèrent la comédie nouvelle, et laissèrent des pièces inimitables. Ces philosophes, dont la doctrine semble découler de la bouche même de Socrate, tardèrent-ils à paraître après Aristote et Platon ? Avant Isocrate, après ses disciples et leurs élèves, quel