Page:Hobbes - Œuvres philosophiques et politiques (trad. Sorbière), 1787.djvu/203

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la rupture d’une assemblée irrévocable est une espèce de mort du peuple ; comme en un homme, c’est mourir que d’entrer dans un si profond somme qu’on ne s’en éveille jamais. De même donc qu’un roi qui n’a aucun héritier, s’il donne, en s’endormant d’un somme éternel, c’est-à-dire, lorsqu’il s’en va mourir, le gouvernement de son royaume à une personne qui le doive régir jusqu’à tant qu’il s’éveille, il lui en laisse évidemment la succession. Ainsi le peuple, qui en élisant un roi temporaire, s’est ôté la puissance de convoquer une nouvelle assemblée, a donné au prince la domination sur la république. Mais au reste comme le roi, qui s’endor­mant pour faire un petit somme, laisse à un autre l’administration de son royaume, la reprend dès qu’il s’éveille ; de même le peuple, se réservant en l’élection d’un roi temporaire, le droit de former en certain lieu et à certain jour une autre assemblée, recouvre au jour préfixé l’usage de la souveraineté. Et comme un roi, qui a donné l’administration de ses affaires à quelque autre pendant qu’il veille, peut la lui ôter quand bon lui semble : ainsi le peuple, qui a le droit de s’assembler pendant le règne d’un monarque temporaire, peut en tout temps lui ôter la couronne. En un mot, le roi qui commet le gouvernement de son royaume à un sien ministre pendant qu’il doit dormir et qui après cela ne peut point s’éveiller, si celui qu’il a substitué ne le veut,