Page:Hobbes - Œuvres philosophiques et politiques (trad. Sorbière), 1787.djvu/276

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monarque, et lui ôtent le maniement des finances, dont ils commettent la direction à certains autres. Or, comme les finances sont les nerfs de la guerre et de la paix, ceux qui font ce partage prétendu n’avancent rien du tout : car ceux qui manient l’argent ont véritablement l’autorité souveraine, et l’autre n’en a qu’un vain titre ; et cette division va à la ruine de l’État, vu que s’il était de besoin de prendre les armes, on ne saurait faire la guerre, ni entretenir la paix sans argent.


VI. On enseigne communément, que la foi et la sainteté ne peuvent pas être acquises par étude et par raisonnement : mais qu’elles sont infuses et inspirées tou­jours d’une façon surnaturelle. Si cela était vrai, je ne sais pourquoi c’est que l’on nous ferait rendre raison de notre foi ; ou pourquoi c’est que l’on ne tiendrait pas pour prophètes tous ceux qui sont vraiment chrétiens, ou pourquoi c’est que chacun ne jugerait pas de ce qu’il a à faire, et de ce qu’il a à éviter par sa propre inspiration, plutôt que par les commandements de ceux qui gouvernent, et par les maximes du bon sens, ou de la droite raison. Mais on retombe par ce précipice dans l’erreur de vouloir faire connaître un particulier du bien et du mal, ce que l’on ne saurait intro­duire sans une ruine totale de la société civile. Cependant, cette opinion est si fort étendue dans la chrétienté, que le nombre de ceux qui sont apostats de la raison naturelle, et